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Après avoir rejeté sans ménagement, dès le mois de juillet, la candidature de Lucie Castets, proposée par les partis composant le Nouveau Front populaire (NFP), puis avoir tenté en vain, au cours des deux dernières semaines, de détacher le Parti socialiste (PS) de cette alliance, il ne restait plus à Emmanuel Macron qu’à se tourner sur sa droite pour trouver un locataire à Matignon, mais aussi vers l’extrême droite pour s’assurer que celui-ci puisse compter sur une potentielle majorité. Il est trop tôt pour savoir si le choix de Michel Barnier sera de nature à sceller une alliance durable entre la droite républicaine et le camp présidentiel. Il est clair, en revanche, que même en comptant sur les vingt-deux députés du groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires, voire sur les sept non-inscrits, la survie du nouveau gouvernement sera désormais entre les mains du Rassemblement national (RN), puisque, en comptant très large, Michel Barnier ne peut a priori tabler que sur le soutien d’au maximum 242 députés, très loin de la majorité absolue de 289 élus sur les 577 qui composent l’Assemblée nationale.
La nomination de Michel Barnier ne tourne donc pas seulement le dos à la force politique arrivée en tête des élections législatives, mais elle acte la fin du front républicain que, tant bien que mal, le président de la République a accepté lors des élections législatives des 30 juin et 7 juillet après en avoir déjà largement bénéficié en 2017 et 2022. Elle ouvre de facto la voie à un gouvernement soutenu par l’extrême droite, comme c’est par exemple le cas en Suède depuis 2022.
En imputer la responsabilité au PS, comme se sont empressés de le faire les macronistes, n’est guère convaincant. Le refus d’Emmanuel Macron de se plier à la logique parlementaire, qui impliquait de nommer un premier ministre issu de la coalition arrivée en tête des élections, s’explique avant tout par son refus d’accepter toute remise en cause de sa politique économique et sociale. Elle a eu pour conséquence de déresponsabiliser les partis et les groupes parlementaires et à les pousser à camper sur leurs positions.
Se mettre sous la coupe du RN plutôt que sous celle du NFP peut bien sûr se comprendre d’un point de vue idéologique : les revendications économiques et sociales portées par le RN apparaissent très en retrait par rapport à celles du NFP ; si certaines mesures de son programme, telles que la baisse de la TVA sur les carburants ou l’indexation des pensions sur l’inflation, sont très onéreuses, Jordan Bardella n’a eu de cesse, durant la campagne des législatives, de rappeler que le RN saurait tenir compte des contraintes budgétaires. Surtout, le RN, qui compte dans ses rangs de nombreux chefs d’entreprise, artisans et commerçants, est bien peu critique à l’égard de la politique de l’offre ; il n’hésite d’ailleurs pas à soutenir de nouvelles déductions de cotisations sociales ou d’impôts pour les entreprises.
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